Lynda Lacoste:Bonjour
et bienvenue dans "Le Mag". Aujourd'hui, c'est un
mag
exceptionnel puisqu'il s'agit de Mylène
Farmer qui
n'accepte que très rarement de venir à
la
télévision. N'oubliez pas que pour tous
les
artistes, vous pouvez poser des questions soit par internet, soit par
minitel, soit par téléphone. Allons-y pour la
première partie ! Bonjour
Mylène. Merci
beaucoup d'être venue dans "Le Mag". Alors, vos
concerts
sont toujours des spectacles avec une répétition,
j'imagine, immense. Mais est-ce que ça vous est
arrivée de littéralement ne plus pouvoir marcher
sur vos
pieds à cause des talons aiguilles ? Et, comment faites-vous
pour vous récupérer vite ? Mylène
Farmer : Pour me récupérer
vite, je me suis
beaucoup entraînée avant de faire cette
scène.
J'ai un entraînement physique. Quant aux talons
aiguilles,
c'est assez facile de marcher avec, finalement ! Lynda Lacoste: Ah
bon ? Moi, j'ai du mal. Mais, c'est le fait de
danser avec... Mylène
Farmer: Je ne danse pas sur des talons aiguilles, ce
sont
des talons qui sont un petit peu plus larges, quand même.
Mais
c'est une difficulté, en tout cas un danger pour
les
chevilles, mais j'ai pris le parti que de choisir ces
chaussures.
C'est plus élégant. Lynda Lacoste : Les
concerts ne
sont pas sans risques. Vous êtes tombée
accidentellement
à Lyon en 96. Qu'est-ce que vous vous
êtes dit
? Est-ce que vous vous êtes dit "Bon, il faut virer
quelqu'un tout de suite !", "Est-ce qu'il faut
calmer la
chorégraphie ? ", "Est-ce qu'il faut faire moins
de
concerts ?". Qu'est-ce que vous vous êtes dit ? Mylène
Farmer : Renvoyer tout le monde ! (rires) Lynda Lacoste : Oh
! On vire tout le monde ! Ça
m'étonnerait ! Oh oui ? Mylène
Farmer : Non. Je ne sais pas bien quoi
répondre.
Ça a été un grand choc pour moi, en
tout cas. Lynda Lacoste: Avec
votre
dernier album, il y avait quand même encore, même
dans
l'an 2000, des clips qui ont été
censurés le
jour. Est-ce que ça vous a choqué ou est-ce que
vous
cherchez exprès d'avoir des clips qui choquent
parce que,
comme ça, on en parle plus ? Mylène
Farmer : Je crois que ça n'a
aucun
intérêt que de vouloir choquer à tout
prix pour que
l'on s'intéresse à vous. Il
se trouve que
j'aborde des sujets qui sont peut-être un peu
épineux, voire tabous. C'est un risque.
Maintenant, la
censure, et spécialement en France, je trouve, est un peu
sévère et s'attaque à tout
et
n'importe quel sujet ce que je trouve vraiment regrettable. Lynda Lacoste :
Même votre premier clip, Maman a Tort,
a été censuré à
l'époque. Mais vous êtes
quelqu'un qui
est capable de faire des clips qui peuvent durer
jusqu'à
dix-sept minutes. Quand vous voyez le niveau que vous avez atteint,
vous, quelle est votre réaction sur le niveau des clips que
l'on peut voir en France en l'an 2000 ? Mylène
Farmer : Là encore, vous me demandez de
porter un
jugement et j'avoue que c'est quelque chose que je
n'aime pas faire. Je peux vous dire en revanche
qu'il y a
des artistes que j'aime beaucoup et qui font de
très beaux
clips. J'aime l'univers de Björk,
j'aime ce
qu'a apporté Peter Gabriel, David Bowie. Il y a
beaucoup
d'artistes qui ont des clips intéressants. Diffusion
d'un très long extrait du clip Optimistique-moi Lynda Lacoste : Sur
cet album,
vous avez travaillé, bien sûr, avec
j'imagine un
homme dans lequel vous avez beaucoup de confiance, Laurent Boutonnat.
Mais, vous avez travaillé avec d'autres
compositeurs pour
cet album-là. Est-ce que... Mylène
Farmer : Non ! Lynda Lacoste :
C'était que lui qui a fait les chansons ? Mylène
Farmer : J'ai fait, moi, quelques chansons,
comme compositeur et comme auteur. Lynda Lacoste :
D'accord. Mylène
Farmer : Et c'est tout ! Lynda Lacoste: Ok.
Mais pour les
gens, les nouveaux gens avec qui vous avez envie de travailler, est-ce
que vous demandez à Laurent son avis ou est-ce que vous lui
parlez après d'avoir déjà
pris votre
décision sur les nouveaux gens avec qui vous avez envie de
travailler ? Mylène
Farmer : Si vous me parlez de composition, je
n'ai
jamais eu le souhait que de travailler avec quelqu'un
d'autre qu'avec Laurent. Maintenant, en terme de
vidéos, oui j'ai fait appel à beaucoup
de
réalisateurs différents. Est-ce que je demande
son avis :
non ! (rires) Lynda Lacoste :
D'accord.
Et, parce que justement vos clips sont d'un tel niveau,
est-ce
que vous accepteriez de travailler avec des nouveaux talents, ou,
est-ce qu'il faut toujours quelqu'un qui ait
déjà fait leurs preuves pour travailler avec vous
? Mylène
Farmer : C'est d'abord
très,
très difficile que de trouver un réalisateur,
donc, je
vois beaucoup, beaucoup de cassettes. C'est vrai
qu'il
m'est difficile d'aller vers quelqu'un
qui n'a
jamais rien fait parce qu'on ne peut pas s'appuyer
sur un
travail qui a déjà..., sur des choses
qui sont
concrètes, réelles. Donc je vais plus facilement
vers des
réalisateurs qui ont déjà
réalisé
des vidéos. Voilà. Donc mon choix s'est
porté vers Marcus Nispel, Abel Ferrara et Michael
Haussman
le dernier. Diffusion
d'un extrait du clip California Lynda Lacoste :
Vous avez un corps magnifique... Mylène
Farmer : (rires) C'est gentil ! Lynda Lacoste :
Est-ce que, pour vous, votre corps est aussi important dans votre
travail que votre voix ? Mylène
Farmer : Non. Non. (rires) Je ne sais pas quoi vous
répondre, si ce n'est que je... (silence)
Tout est
important ! On va dire, aussi bien, alors l'apparence
physique
que le vêtement, que le verbe aussi. Tout est important pour
moi. Maintenant, est-ce que je suis obsédée par
ma ligne,
par mon corps ? Non, absolument pas. Je ne fais du sport que quand je
monte sur scène. Lynda Lacoste :
D'accord.
Ok. Vous êtes la seule artiste française qui est
aussi
collectionnée, et même plus
collectionnée que
Johnny Hallyday. Est-ce que vous êtes quelqu'un qui
prend
plus de temps à choisir les objets que vous avez envie
d'associer avec votre nom ? Et est-ce qu'il y avait
des
objets que vous avez systématiquement refusé ? Mylène
Farmer : Systématiquement
refusé, je
n'en ai pas souvenir. Mais je travaille en tout cas avec
quelqu'un qui me donne des idées.
Parfois,
j'apporte moi-même des idées. Et
là encore,
c'est quelque chose que je qualifie d'important. En
tout
cas, je fais attention, oui, à ce que je propose.
Voilà ! Lynda Lacoste : Il
y a beaucoup
de questions sur l'internet, beaucoup de sites qui vous sont
consacrés. Est-ce que ça vous
intéresse
l'internet ? Et, est-ce que vous regardez les sites qui sont
consacrés sur vous ? Mylène
Farmer : L'internet
m'intéresse, oui.
Mais, j'utilise mon computer surtout pour les e-mails.
J'aime bien correspondre. Lynda Lacoste : Et
est-ce que vous regardez les sites qui sont consacrés
à vous ? Mylène
Farmer : On va rester... Je ne
sais... Je
m'y intéresse, oui. J'ai du mal
à... Le
culte de moi-même est quelque chose qui m'est
difficile.
Maintenant, je sais qu'il y a un travail qui est fait, qui
est
très bien fait. Donc je regarde ça de
près et de
loin. Je vais rester évasive ! Lynda Lacoste :
Alors, sur
l'internet, on dit qu'il y a des sites
où on peut
vous voir nue. Est-ce que votre entourage est au courant de
ça ?
Et, si c'est le cas, pourquoi ces sites existent-ils encore
aujourd'hui ? Mylène
Farmer : Ecoutez, j'ignore ces sites !
(rires)
Maintenant, il est facile de faire arrêt sur image quand on
prend
une vidéo et puis on va sortir l'image en
question.
Maintenant, si je suis dénudée ou nue dans une
vidéo, qu'y puis-je ? Le faire
interdire,
c'est très difficile. Très difficile.
Même si
on interdit, quelqu'un d'autre le fera. Donc tant
pis pour
moi ou... Diffusion
d'un extrait du clip Libertine Lynda Lacoste :
Pensez-vous
qu'on vit dans une société
où les jeunes se
sentent obligés d'être parfaits,
ambitieux,
énergiques tous les jours ? Et, qu'est-ce que vous
pouvez
leur conseiller, les gens qui ont envie d'être
individuels,
uniques et différents ? Mylène
Farmer : De rester unique, c'est
très
important.(silence) Qu'est-ce que je peux rajouter ?
Qu'il
est important, et que je leur souhaite, d'avoir une passion
dans
la vie. C'est un moteur qui est fondamental pour vivre et
survivre. Lynda Lacoste :
Vous avez
beaucoup d'émotion en vous. Est-ce qu'il
y avait des
situations où vous vouliez absolument pas pleurer mais
ça
arrive, et vous sentez que ça monte quand même.
Et,
puisque ça arrive peut-être quand même
souvent, vous
avez une ruse pour éviter les larmes ? Mylène
Farmer : Non, ça, je crois que
c'est quelque
chose que je ne contrôle absolument pas, et je ne veux pas me
défendre que d'avoir justement une
émotion forte.
C'est arrivé énormément de
fois en
scène, à des moments auxquels je ne
m'attendais
absolument pas justement. Et, si je crois, qu'il y a quelque
chose qu'on peut partager en scène avec le public,
c'est justement une émotion. Donc je
n'ai aucune
"immunition". (rires) Lynda Lacoste :
Alors, il y a
beaucoup de comédiens qui adoreraient avoir autant
d'émotions à leur portée.
Est-ce que
ça vous dirait un jour d'être prof de
cinéma
ou de théâtre ? Mylène
Farmer : Absolument pas ! (rires) Non ! Lynda Lacoste : Non
? Mylène
Farmer : Non. Et je crois qu'il y a
beaucoup de comédiens qui ont leur propre
émotion. (rires) Diffusion
d'un extrait du clip live Rêver
puis publicité. Lynda Lacoste :On se retrouve dans
"Le Mag" avec Mylène Farmer. Deuxième partie. Alors, un de mes
films
préférés, c'est un de vos
films
préférés aussi, c'est
"Frances", joué
par Jessica Lange. Et, il y a une scène dans ce film
où
elle revient chez elle, dans sa ville natale, en tant que grande star,
et il y a une femme devant elle qui lui lèche les bottes, et
elle dit "Vous n'étiez pas la femme qui
m'a
haïe il y a dix ans, qui m'a traitée
comme pire que
rien ?". Et donc, tout le monde a bien vu qu'elle
l'a bien
remis dans sa place. A l'époque où vous
étiez mannequin, est-ce que vous avez eu des gens qui vous
traitaient peut-être pas bien, quand vous étiez
anonyme,
et est-ce que vous avez pu vous faire justice aujourd'hui,
avec
la femme que vous êtes aujourd'hui ? Mylène
Farmer : Ecoutez, je n'ai pas beaucoup de
souvenirs, si ce n'est que je vais détourner la
question.
Les personnes qui sont méchantes, vindicatives, il y en a,
et
j'en rencontre encore aujourd'hui. Maintenant,
est-ce que
j'ai une réaction ? En
général,
j'essaie, non, d'avoir la réaction
contraire
à ces instincts premiers, à savoir que je
préfère répondre par la gentillesse
à
l'arrogance. C'est moins douloureux. Lynda Lacoste :
Alors,
justement, vous avez dit que vous êtes dans une
époque de
votre vie où vous êtes en pleine forme, heureuse,
beaucoup
plus équilibrée, beaucoup plus de confiance en
vous.
Mais, pour les jeunes qui vous adorent, qui peut-être sont en
train de vivre des enfances où ils ont du mal à
vivre le
bonheur, qu'est-ce que vous pouvez leur dire pour
qu'ils
sortent de là ? Mylène
Farmer : Là encore, je crois que je
n'ai
aucune, ni solution, ni même conseil, si ce n'est
que
j'en reviens à la réponse
précédente
: c'est tenter de trouver une passion, un moteur dans sa vie.
Maintenant, je crois qu'au travers de la lecture, et
c'est
ce qui m'est arrivé, on peut découvrir
des choses,
trouver des pansements. Et je crois que, dans le fond, la chose
fondamentale, c'est le dialogue, c'est pouvoir
trouver une
forme de communication. Diffusion
d'un extrait du clip XXL Lynda Lacoste :
Vous avez
travaillé avec beaucoup d'américains,
vous avez
travaillé pas mal aux Etats-Unis. Que pensez-vous avoir
appris
avec les américains que vous avez pas pu peut-être
apprendre ici, en France ? Mylène
Farmer : Probablement... (silence) Je pense
au
travail. Ce sont des gens qui sont très investis dans leur
travail. Ce sont des personnes je crois qui n'ont pas peur du
succès et, qui le revendiquent même. Je crois que
c'est une rigueur dans le travail surtout. Maintenant, est-ce
que
j'ai appris ça d'eux, je n'en
sais rien mais,
en tout cas, j'ai pu, ne serait-ce que pendant les tournages
de
vidéos, de... Chacun est réellement
à sa
place et s'investit dans son travail, voilà. Il
n'y
a pas de mélange entre le sentiment et la fonction. Alors,
parfois c'est désagréable, mais parfois
c'est
agréable parce que c'est efficace et que
ça va vite. Lynda Lacoste :
Alors, ce qui
est rare avec les artistes, c'est que vous avez des fans qui
peuvent venir vingt-quatre heures avant un concert pour venir vous
voir. Et donc ils sont là peut-être pour
être
sûrs d'au premier rang, alors peut-être
ils mangent
pas, peut-être ils boivent pas, et le concert commence, ils
tombent dans les pommes donc ils voient même pas le concert !
(rires) Mylène
Farmer : C'est un peu dramatique tout
ça, non ? (rires) Lynda Lacoste : Non
mais
ça existe ! Alors qu'est-ce que vous avez envie de
dire
à tous ces pauvres gens qui vous adorent, qui ont
même pas
vu le concert du coup ? Mylène
Farmer : Et bien que c'est dommage pour moi
! Lynda Lacoste :
Mais est-ce que
vous pensez que c'est une des raisons pour lesquelles vous
aimez
bien sortir des live et faire des vidéos de vos concerts ? Mylène
Farmer : Je ne suis pas sûre de comprendre
le sens... Lynda Lacoste : Si
il y a
tellement de gens qui tombent dans les pommes donc ils voient pas le
concert, ils vont le voir en vidéo ? Mylène
Farmer : (rires) Je ne sais pas. Mais, en tout cas,
c'est quelque chose de très intéressant
que de
travailler sur un live, oui. Lynda Lacoste :
Alors, votre
dernier concert a été filmé avec une
douzaine de
caméras, je crois. Est-ce que vous vous sentez
différente
le jour où vous savez que ça va être
filmé,
et est-ce que votre spectacle s'est organisé en
fonction
du fait que vous savez qu'il faut que ce soit
filmé
aujourd'hui ? Mylène
Farmer : Non, absolument aucun changement. Quant
à
mon comportement, moi-même, je crois qu'on ne peut
pas
ignorer totalement la présence des caméras.
Maintenant,
je crois qu'il y a une dimension telle en scène
qu'on finit par oublier ces choses-là. Dans les
dix
premières minutes, c'est assez présent,
et puis
après, je fais totalement abstraction. Et le spectacle est
totalement le même avant, après. Diffusion
d'un extrait du clip live La
Poupée qui fait Non
(en duo avec Khaled) Lynda Lacoste :
Alors, vous
êtes la seule artiste française, encore une fois,
mais
cette fois-ci, vous êtes la seule artiste
française pour
être une artiste diamant. C'est-à-dire
que tous les
albums que vous vendez, ça se vend à plus de un
million.
Alors, puisque vous voyez que vous avez un tel succès en
France,
est-ce que vous avez envie, parce que, en plus, vous êtes
quelqu'un qui adore travailler, vous avez
envie peut-être d'apprendre d'autres
langues pour
toucher d'autres marchés dans le monde ? Mylène
Farmer : Ecoutez, jusqu'à
présent,
ça a été un refus de ma part.
Plusieurs fois, on
m'a, j'allais dire "proposé" de faire un
album
anglais ou dans une autre langue. Dans la mesure où
j'écris moi-même mes textes, il
m'est
difficile d'envisager, ou une adaptation de
quelqu'un
d'extérieur, ou moi-même, je ne
possède pas
la langue suffisamment pour pouvoir traduire. Et dans la langue
française, dans ma langue en tout cas, j'aime bien
jouer
avec les mots. Donc c'est très
compliqué de trouver
ça dans une langue qui n'est pas la
vôtre. Lynda Lacoste : On
est souvent
touché par les peintres parce qu'ils arrivent
à
nous toucher vraiment à l'intérieur de
nous. Quelle
est la dernière exposition que vous avez vue où
vous avez
été vraiment et réellement
touchée ? Mylène
Farmer : C'était dans un
musée
à New York et... L'art
moderne... Je peux vous
dire les peintres que j'aime : Egon Schiele,
évidemment. J'aime Max Ernst.
J'aime Picabia.
Et, je vais oublier probablement tous ceux que j'aime ! Mais,
j'aime la peinture, oui. Ce sont des moments très
privilégiés. Diffusion
d'un extrait du clip Je
te rends ton amour Lynda Lacoste : Il
y a un moment
dans votre concert où il y a quelqu'un qui peut
monter sur
scène avec vous. Comment assurez-vous la
sécurité
dont vous avez besoin ? Parce que on sait jamais... Mylène
Farmer : Là encore... Est-ce que
c'est de
l'inconscience ? J'en sais rien. Mais je ne pense
pas
à ces moments d'hypothétique danger. Et
là
encore, c'est un moment spontané. J'ai
mis beaucoup
de temps avant que de faire monter quelqu'un sur
scène.
Et, je préfère là encore une
spontanéité. Donc il m'est
arrivé, ce
n'est pas systématique, de faire monter
quelqu'un.
Et, dans ces cas-là, non, je pense à autre chose
qu'à un danger. Plus un partage. Lynda Lacoste :
Vous êtes
terriblement connue dans les pays francophones. De tous les pays
d'Europe, pourquoi avoir choisi la Russie ? Mylène
Farmer : Pourquoi la Russie ? Parce qu'ils
ont
diffusé, quand j'ai commencé ce
métier, ils
ont diffusé énormément de
vidéos. Et puis,
il y a des personnes là-bas qui ont beaucoup
travaillé
sur moi. Et j'avais très envie de
découvrir la
Russie, en tout cas son public. Je ne peux pas vous dire que je connais
bien la Russie, si ce n'est que Saint-Pétersbourg
est une
ville magnifique, que j'y ai fait quelques rencontres qui
sont
assez jolies aussi, avec beaucoup d'artistes, des peintres
notamment, et que c'est un changement parce que
c'est un
public qui n'est pas "acquis", si tant est qu'on
puisse
avoir un public acquis, mais vraiment là,
c'était
quelque chose d'assez étonnant. D'autre
part, ils
sont quand même assez brimés : ils n'ont
pas le
droit de se lever pendant un concert, ils n'ont pas
réellement le droit de manifester leur joie, et ils
l'ont
quand même fait, à la fin du concert : ils se sont
levés, ils se sont approchés au bord de
scène. Ce
sont des moments assez forts. Diffusion
d'un extrait du clip Tristana Lynda Lacoste : A
la sortie
d'une tournée, normalement, pour la plupart des
gens,
c'est des vacances. Mais vous avez déjà
envie de
retravailler tout de suite ? Mylène
Farmer : Je travaille déjà
(rires). Je
travaille sur le live en studio, sur le mixage. Et, bientôt
sur
le film du live. Et, j'ai quelques projets à
venir, donc
ce sera une période de travail. Lynda Lacoste :
Est-ce que vous
êtes quelqu'un qui peut très bien
prendre des
vacances, ou est-ce que vous vous sentez tout de suite coupable le jour
où vous ne travaillez pas ? Est-ce que vous êtes
plus
contente quand vous travaillez ? Mylène
Farmer : J'ai cette culpabilité,
oui, mais
j'ai ça en moi : j'aime le travail.
C'est
quelque chose que j'aime profondément donc
c'est... Là encore, je me nourris de
ça
très facilement. L'oisiveté ne me sied
pas du tout
! (rires) Lynda Lacoste :
Alors, ce qui
est formidable, c'est que vous êtes, je crois, une
perfectionniste, et c'est bien dans le travail. Mais est-ce
que
ça veut dire que, après chaque concert, vous
prenez les
musiciens, les chanteurs, les techniciens et que vous faites une
espèce de résumé du concert ? Mylène
Farmer : Non, du tout. Lynda Lacoste :
Jamais ? Mylène
Farmer : Non, non. Ni avant. Je sais qu'il
y a
beaucoup d'artistes qui aiment prendre la main de leurs
camarades
et faire une prière avant de monter sur scène.
J'avoue que je ne connais pas ça. Et
après le
travail, non. Après le travail, c'est
terminé.
Après, chacun ponctuellement apprécie ou
n'apprécie pas le moment. Mais c'est
plus quelque
chose, j'allais dire, un état solitaire, de
solitude, en
tout cas pendant la première heure. Mais ce qui ne vous
empêche pas les éclats de rire. Maintenant, quant
au
résumé de la situation, de ce qui s'est
passé, non ! Lynda Lacoste :
Justement,
est-ce que, pendant un concert, vous avez envie de vous
éclater
de rire, parce que vous voyez un danseur qui a fait un faux pas, ou je
sais pas quoi ? Et est-ce que ça vous est arrivé,
devant
votre public, de sortir de la chanson carrément ? Ou est-ce
qu'il y a jamais eu quelque chose comme... Mylène
Farmer : Sortir de la chanson, non. Maintenant, des
éclats de rire, oui, bien sûr. Bien sûr.
Ce qui fait
qu'on n'est pas des robots non plus ! (rires) Diffusion
d'un extrait du clip Je
t'aime mélancolie Lynda Lacoste : Il
y a quelque
chose dans mon émission où les
téléspectateurs peuvent poser trois questions.
J'en
ai pris trois. Première question, c'est que, bien
sûr, il y a beaucoup de vos fans qui se sentent
frustrés
parce qu'ils ne vous entendent pas assez en dehors de la
scène, et ils ne vous voient pas assez non plus -moi, je
suis
ravie que vous êtes là aujourd'hui !
Et, est-ce que
ça vous dirait un jour d'être un peu
plus proche
d'eux, dans leur avis ? Mylène
Farmer : Moi je n'ai pas la sensation que
d'être loin d'eux. Donc, là
encore, une
pirouette probablement, mais, j'ai l'impression
d'être très proche d'eux.
Maintenant, est-ce
que ça doit passer par l'interview, par la
justification ?
Je n'en suis pas sûre. Je me sens, en tout cas moi,
proche
d'eux. Lynda Lacoste : Ok.
Deuxième question . Vous avez dit que la
vulnérabilité est un compagnon
agréable et
nécessaire. Est-ce que, finalement, ça vous
ennuierait
d'être parfaite, même s'il y a
des jours
où vous tentez à tout prix de
l'être ? Mylène
Farmer: Là encore, je ne sais pas ce
qu'est un être parfait... (silence puis
rires) Lynda Lacoste :
Mais il n'y a pas des jours on a quand même envie au moins de
faire le mieux qu'on peut faire ? Mylène
Farmer : Perfectionniste, oui. Parfait, absolument
pas,
non. Ce n'est pas une quête en soi. Mais
perfectionniste
dans mon travail, oui. Là, ça part, je crois,
d'un
respect de l'autre et respect de soi-même. Je
prends du
temps avant de faire une pochette, je réfléchis.
J'ai envie d'offrir des choses qui, moi, me
plaisent
vraiment et... Lynda Lacoste :
Troisième
question internet et dernière question. Pour les gens qui se
sentent un peu perdus, peut-être ils sont athées,
je ne
sais pas, qu'est-ce que vous pensez que le bouddhisme
pourrait
leur apporter ? Et je crois qu'il y a plusieurs styles de
bouddhisme… Mylène
Farmer : Ecoutez, ne serait-ce que par
curiosité,
découvrir cette philosophie. Dire qu'elle est
probablement
plus douce que d'autres philosophies ou religions,
qu'elle
est probablement, en tout cas ça l'a
été
pour moi, plus convaincante, que ce peut être simplement
juste un
passage dans leur vie, mais que c'est, en tout cas,
intéressant que de s'ouvrir à cette
philosophie.
Ça peut panser l'âme, ça peut
aider en tout
cas. Là encore, j'en reviens à
l'idée
de dialogue. Si on n'a pas la chance d'avoir
quelqu'un à qui parler, on peut le faire au
travers
d'une lecture comme ça, parce que vous avez
beaucoup de
réponses. En tout cas, si ce ne sont pas des
réponses, en
tout cas, des tentatives de réponses. Lynda Lacoste : Ok.
Je vous remercie beaucoup d'être venue. Mylène
Farmer : Merci à vous. Lynda Lacoste : Et
bon travail ! Mylène
Farmer : Merci beaucoup. Lynda Lacoste :
Merci bien. Mylène
Farmer : Merci.