Longue
interview de Mylène Farmer proposée dans une
émission diffusée sur TF1 le dimanche 08 janvier
2006 entre 19 et 20 heures, quelques jours avant le début de
ses concerts à Bercy, concerts qui affichaient complets
depuis des mois.
Cette interview avait été annoncée
massivement par les médias les jours
précédents. Mylène avait
même fait, notamment, la Une du magazine le plus lu de
France, TV Magazine (lire dans cette rubrique), dans
lequel on retrouvait une interview de Thierry Demaizière.
Le journaliste avait contacté Thierry Suc fin 2004 afin de
lui faire part de son désir d'interviewer Mylène.
Celui-ci lui avait alors répondu que ce n'était
pas alors le moment. Thierry Suc, recontactera Thierry
Demaizière mi-décembre 2005 pour organiser
l'interview de Mylène.
Sur le contenu de l'interview, aucune exigence de Mylène si
ce n'est, ne pas aborder la vie privée et parler des
concerts à Bercy.
Mylène souhaitait que l'interview se déroule dans
un lieu lumineux, grand, ouvert sur l'extérieur.
L'entretien a donc été enregistré
quelques jours avant Noël 2005 dans une galerie d'art
située à proximité de la Place des
Victoires à Paris.
Pas de caprice de star, Mylène ayant juste
demandé des bonbons à la fraise (les fameuses
Fraises Tagada), un coin tranquille pour se décontracter et
fumer. et que personne ne se trouve dans son axe de vue.pendant
l'interview.
Elle est arrivée maquillée et coiffée.
L'interview a duré une heure et quart. Quinze minutes seront
diffusées.
D'après des interviews accordées par Thierry
Demaizière, on apprend quelques
éléments sur des sujets abordés par
Mylène mais non diffusés: elle contestait les
chiffres et les infos annonçant à tort des ventes
décevantes pour l'album Avant
que l'ombre..., elle aurait été
blessée par un article publié dans Paris-Match
peu de temps avant son interview.
Thierry Demaizière:
Dix ans sans qu'on vous ait entendue. Aucune interview. Six
années sans qu'on vous entende chanter. Six
années sans vous voir sur la scène. Vous aimez
l'absence ? Mylène
Farmer : J'ai... C'est une
nécessité. C'est par timidité,
croyez-moi. Vous avez presque
une timidité intimidante... C'est
ce qu'on m'a dit souvent et, je sais que déranger me
dérange profondément également donc,
j'avoue que c'est un exercice extrêmement difficile. Votre
timidité n'est pas la seule explication. Pourquoi vous vous
cachez si longtemps avant de réapparaître ? Je
ne sais pas si ce n'est pas ma seule explication. En tout cas, je
sais que j'ai du mal à... (silence) je crois que c'est
au-delà de ça, de parler de moi. C'est quelque
chose qui m'est presque insurmontable. Je vous dois une semaine et
demie d'insomnies et un presque ulcère. (Rires.) Excusez-moi... Je
vous en prie. A ce point
là
? Oui,
vraiment, oui. Est-ce que c'est parce que je ne me sens pas
suffisamment ni intéressante, ni importante, ni assez
nombriliste... probablement, probablement. Ce qui ne
m'empêche pas de monter sur scène. Vous allez
commencer un vendredi 13. Sur 13 dates. Il y aura 13 000 personnes
chaque soir à Bercy. Vous aimez le 13 ? J'aime
le 13. Mais, ce n'est pas de superstition.
Les places sont
vendues depuis presque un an. Ils attendent tous comme des fous. Ca va
être, paraît-il, énorme,
intransportable. Vous pouvez nous en dire quelque chose ou,
là aussi, c'est le secret de ce spectacle ? Ecoutez,
je vais garder ce goût du secret. Vous dire aussi
que je regrette de ne pouvoir aller en province mais, que ce spectacle
est réellement intransportable. Donc, j'ai
demandé au public de venir à moi ce qui peut
paraître un manque d'humilité mais, c'est vraiment
pour... j'allais dire, j'espère la grandeur de ce spectacle
et son côté exceptionnel, extraordinaire Oui. Et, pour
apparaître si peu, si rarement, est-ce que pendant ces
années où vous disparaissez, le public vous
manque ? Oui.
On a toujours, moi particulièrement, parce qu'il y a
toujours... je crois que, profondément, rien n'est acquis.
On a toujours peur de l'abandon. Je pense que le sentiment d'abandon
est quelque chose qui me hante. Vous pourriez dire
comme Barbara, "ma plus belle histoire d'amour, c'est vous" au public ? Je
le dis, oui. Oui, oui, c'est ma confession. On
dit beaucoup de choses sur moi. On dit beaucoup de choses totalement
erronées. On invente, j'imagine, ma vie. On invente mes
émotions. Maintenant, je sais, je suis consciente, je sais
le risque du silence. Il y a certainement des personnes qui m'en
veulent parce que, ce silence, qui pensent que c'est de nature hautaine
alors que ce n'est que discrétion de ma part. Que j'ai
beaucoup de mal à me raconter. Certains se
demandent aussi si ce n'est pas une stratégie de
communication, comme Garbo se taisait. Plus on se tait, plus on attise
le mystère et, plus il y a de mystère, plus on
invente et, plus on invente, plus on veut savoir... Ce qui provoque
cette espèce de dévotion... Ca,
je ne sais pas. Je suis consciente, une fois de plus de la nature
de
ce mystère et de ce que ça peut engendrer.
Maintenant, est-ce que c'est une stratégie, je vais vous
dire, non. Bien sur que non ! C'est ma nature profonde. Je ne fais pas
partie de ce système en ce sens que je fais très,
très peu de télés, je ne fais
quasiment pas d'interviews. Mais, une fois de plus, j'en reviens
à ma nature profonde. Et, quand on ne fait pas partie d'un
système, le système veut vous
détruire. Et puis, j'ai eu la chance d'avoir eu pendant
vingt ans des personnes qui m'ont suivie, qui m'ont... Qui vous sont
fidèles, mais qui vous sont fidèles presque au
sens religieux du terme.. Vous avez provoqué
presque une dévotion et vous
avez presque l'aura d'une diva. Il y a pleins de livres qui arrivent en
ce moment. Un fan qui, pendant deux ans, vous a attendue. C'est presque
dément. Est-ce que c'est violent quelques fois? Je
ne sais pas, violent... C'est perturbant parfois. Du moment que ces
personnes ne gâchent pas leurs vies pour moi, alors, je suis
en paix. Mais, si j'ai le sentiment, effectivement, qu'ils passent
à côté de quelque chose parce que je
deviens l'élément absolument essentiel,
là ça me perturbe beaucoup. Un fan,
là c'est une des histoires les plus dramatiques qui vous est
arrivée, qui est allé tuer le
réceptionniste de votre maison de disques, il y a quelques
années de ça. Donc, votre absence quelque part,
les pousse à la folie. Je
ne sais pas. Pour parler de cette personne, peut-être
cette personne était-elle perturbée
elle-même, avant même de... c'est toujours un peu
dangereux d'avoir ce genre de propos. Et, c'est suffisamment
douloureux, croyez-moi, pour moi de vivre ce genre de choses. Est-ce que vous
comprenez cette période qui se prête
beaucoup au confessionnal, où justement les stars n'ont plus
beaucoup d'intimité et aiment raconter leur enfance et leur
histoire ? J'essaye
de ne pas juger. Mais, c'est vrai que je trouve un petit peu
dommage, pour vous paraphraser, ce manque de mystère chez la
plupart des artistes. Je n'ai pas envie de savoir ce qu'elles mangent
le soir. Je n'ai pas envie de savoir avec qui elles... je ne dirai pas
le mot. (Rires.) Je crois qu'il faut se préserver un petit
peu. Je crois que
là, on vient d'avoir un bout de votre mystère.
C'est qu'en fait, vous riez ! Vous êtes figée dans
l'image un peu morbide où vous n'aimez que la nostalgie, la
mélancolie, la souffrance... Ça
fait partie de moi aussi. Ça fait partie de bon nombre
d'entre nous.
On peut être fait de désespérance, de
joie, enfin,
autant de choses qui se bousculent et se contredisent. Je fais partie
de ces personnes qui sont, effectivement, un petit peu
obsédées par la mort, l'idée de mort.
Tout simplement, le fait d'être mortel est quelque chose
d'insupportable. Donc, j'ai ce fardeau avec moi. Maintenant, vous dire
que je suis quelqu'un de morbide, que je dors dans un cercueil et que
je m'alimente d'araignées, non ! (Rires.) Et, j'aime les
fraises Tagada ! (Rires.) Est-ce qu'il vrai,
quand même, que votre grand-mère, petite, vous
emmenait visiter les cimetières ? Ça,
c'est en tout cas un des rares souvenirs que j'ai. Mais ce sont des
lieux qui ne sont pas pour moi morbides du tout. Un
cimetière, c'est pour moi un lieu de paix, un lieu de repos.
J'arrive tout à fait à me recentrer dans un
cimetière. (Enfant,
Mylène mettait des mouchoirs dans son pantalon pour
ressembler à un garçon...) C'est
véridique. Il y avait une personne qui me disait
fréquemment quand j'étais plus petite, que,
Mylène était très jolie pour un
garçon. Parce qu'en fait, j'avais une voix assez grave, que
j'ai un peu forcée de muer avec le temps. Vous avez toujours
ce rêve d'être un garçon ? Non
! (Rires.) Une autre rumeur
dit que vous auriez pleins de miroirs chez vous.. Alors, est-ce que
vous aimez les miroirs ou est-ce que vous détestez les
miroirs ? Alors,
j'avoue que là, je n'ai pas plein de miroirs chez
moi. Au contraire, je crois n'en avoir aucun. Maintenant, la
nécessité que de se regarder en permanence, mais
c'est plus dans le souci de n'être pas assez jolie, pas assez
bien, pas assez prête. Je crois que c'est plus de la nature
d' une angoisse que d'un narcissisme profond. Donc, vous pourriez
dire que le miroir est votre pire ennemi? J'avoue qu'il ne
m'est pas sympathique en tout cas.
(Rires.) Vous aviez dit une
fois que vous aviez des singes. Je crois que vous n'avez plus qu'un
seul singe ? J'ai
un singe, oui. Je vis avec depuis près de vingt ans
maintenant. C'est un petit singe capucin. C'est de petite taille et
c'est un animal très intelligent. C'est un ami pour
vous ? C'est
un compagnon. C'est une petite fille. Comme vous parlez
peu, on parle à votre place. Les biographies sont
nombreuses, quelques fois démentes. Je vais prendre la plus
démente. C'est une biographie où on raconte qu'un
putois, petite, vous aurait uriné dessus. Que vous en auriez
eue un grand traumatisme et que pour vous laver de cet affront, votre
mère vous aurait mis dans un bain de tomates. Vous confirmez
? Ecoutez,
moi, on m'a absolument infirmé cette histoire
donc... Voilà, je pense que c'était une
très jolie histoire, un peu dramatique, un peu sulfureuse
mais ça n'est pas la réalité, non ! Vous en souffrez de
tout ça ou vous vous dites, "c'est le prix que je dois payer
puisque je me tais" ? Les
personnes qui s'autorisent à violer le territoire d'une
autre personne pour obtenir ou pour inventer des propos, ça,
je trouve ça extrêmement
déplacé. Je crois que pour faire ce
métier il faut avoir les reins solides parce qu'il y a des
ennemis mortels. On sait qu'il n'y a
pas de grand talent sans grande fêlure. On a
deviné chez vous qu'il y avait une fêlure. On sait
que Johnny Hallyday a été un enfant
abandonné. On sait que Barbara a été
une enfant violée. Est-ce que vous connaissez votre
fêlure ? Est-ce que vous connaissez votre mystère,
votre secret ? Vous avez le droit de ne pas nous le dire, mais, est-ce
que vous le connaissez ? Oui.
Bien sûr.
Si on devait se
servir comme seule biographie officielle de vos textes de chansons,
vous dites: "J'ai peur de l'heure qui me ramène à
des songes emportés, à des mondes
oubliés, à des nuits de veille et
mémoire inachevée." On a l'impression que bon,
l'ombre c'est la mort, qu'avant de mourir vous avez peur que les
cauchemards reviennent, que des souvenirs terribles reviennent... Ecoutez,
j'essaye de plus en plus, et j'avoue que ce n'est pas facile,
d'extraire de ma vie et à jamais du ressentiment.
Maintenant, dire qu'on a des fardeaux à traîner,
bien évidemment . Que des plaies ouvertes ont du mal
à cicatriser, oui. Maintenant, vous racontez la nature de
mes plaies, parfois elles sont précises dans mon esprit,
parfois elles sont très troubles, je n'en sais rien. Je
crois que c'est aussi le fait de n'avoir que très,
très peu de souvenirs de mon enfance. Et, j'avoue que c'est
troublant pour moi-même. Et, n'ayant pas fait appel
à l'analyse... C'est à
dire qu'à partir de douze ans , avant douze ans, vous ne
vous souvenez presque plus de rien ? Non,
de rien. Mais même après. Vous pensez qu'un
jour, vos souvenirs vont revenir ? Un jour, vous allez
récupérer votre passé, votre histoire ? Non.
Non, certainement pas. Je pense que ce sont des pages
effacées et puis, une fois de plus, peut-être que
je n'en ai pas réellement la nécessité
que de savoir le pourquoi du comment... Laissons ça dans
l'obscurité. Puisque vous n'avez
pas parlé depuis dix ans, qu'est-ce qui s'est
passé dans votre vie depuis dix ans que vous pouvez nous
dire ? Sur votre état d'esprit, sur votre ouverture au
monde,
sur votre santé, sur... (Rire.)
Vous allez de mieux
en mieux ? Non,
non, je ne pense pas. Autant de colère... Après
quoi ? Je
ne sais pas. Je suis née en colère. (Rires.)
J'ai commencé par le "je déteste" et puis,
après, j'ai appris à aimer. (Rire.) Vous diriez
aujourd'hui que vous êtes une grande personne ? Non... Toujours une enfant
? ...
Grand dieu, non ! Oui, oui, oui... Vous ne voulez
toujours pas grandir ? Non,
ça ne comporte aucun intérêt.
Non... Vous l'acceptez de
vieillir ? Oui
! Oui, oui. Vous dire que c'est douloureux, probablement. Mais...
mais voila, je n'ai pas le choix. (Le
contrôle de l'image). Ca va jusqu'à une image, une
photo que vous n'aimez pas, vous dites, c'est mon métier,
c'est mon image, je veux contrôler ça... Evidemment,
c'est vrai que... Là encore, c'est un
département encore plus douloureux. C'est vrai que quand on
ne s'aime pas ou qu'on ne s'accepte pas, on est beaucoup plus critique
envers soi-même. Donc, il y a des choses que je
déteste et quand on déteste, on
déchire. Vous
préférez le mot "sexe" ou le mot
"désir" ou "plaisir" ? "Désir",
c'est un joli mot. On peut dire que
c'est un des thèmes majeurs chez vous... Oui.
Oui, l'envie de, oui... De provoquer ? Le
désir ? Aussi, bien sûr ! Et d'où
vous vient cette liberté incroyable que vous avez,
même d'un point de vue où il n'y a pas de tabous,
tout désir est respectable et.... Peut-être
de mes lectures. Peut-être que j'ai lu
Sade un peu trop tôt, peut-être que je l'ai
dévoré... Et voilà, il y a des
personnes qui vont vous raconter, se raconter volontiers... J'ai plus
de facilité, moi, peut-être, à raconter
des désirs sexuels, des épanchements... Il y a quelques
années, vous disiez que ça serait
mortifère pour vous de ne pas accomplir tous vos fantasmes.
Vous les avez accomplis ? C'est
chose faite ! (Rires.) On s'ennuie
après ? On
s'ennuie ! (Rires.) On en trouvera d'autres... Ce qu'il y a
d'épatant et de troublant chez vous, c'est que vous
êtes à la fois... être aussi timide et
aussi osée ? C'est
le paradoxe que je dois vivre tous les jours. Vous avez peur du
tiède ? Je
déteste le tiède ! Est-ce que vous
avez l'idée, quelque part, que tout est permis, que tout
vous
est permis en tout cas ? En
tout cas, je ne m'interdis rien, si ce n'est... Je fais appel
à ma mémoire, mais je me souviens quand j'ai
écrit C'est
une belle journée, dans le refrain, j'avais
mis: "C'est une belle journée / Je vais me tuer",
à la place, aujourd'hui, de: "C'est une belle
journée / Je vais me coucher". Et, je crois que
là, ce pourrait être un appel au suicide pour
certaines personnes un peu fragiles. Et, j'ai changé ce mot
pour un autre, parce que c'était peut-être tout
d'un coup quelque chose de trop fort, trop déterminant. Je
crois que tout est possible à partir du moment
où, une fois de plus, on ne fait de mal à
personne. Vous l'avez acquis
où, cette liberté ? Ce sont vos parents ? Je ne sais pas. Vous avez
été rebelle, tout de suite, tout le temps ? Oui.
Plutôt cachée. Plutôt dans sa forme
autistique... est-ce qu'on dit ce mot ? Oui ? Ce métier a
été ma survie et, ça, je le dis sans
sens dramatique, aucun. Ca a été vraiment vital
pour moi, sinon, je n'avais aucun sens à ma vie. L'envie,
une fois de plus, de donner et, surtout, de recevoir, aussi. Puisque vous avez
employé le mot "autistique", je me permets d'en parler. Vous
êtes fascinée et vous allez voir sans
caméras, ça vous honore, souvent, les enfants
malades... Moi,
c'est vrai que j'ai fait pas mal de visites dans les
hôpitaux, voir les enfants malades. Mais, j'ai surtout... et
je vais vous donner peut-être une toute petite clé
de ma vie, puisque, en tout cas, c'est un souvenir, quelque chose
d'extrêmement marquant dans ma vie: je crois, aux alentours
de onze ans, je suivais donc des cours de catéchisme et,
tous les dimanches, nous allions à l'hôpital de
Garches, pour aller voir des enfants malades,
tétraplégiques et, on avait pour mission que de
jouer avec eux, de s'occuper d'eux. C'est insupportable. C'est
insupportable pour quelqu'un qui marche, pour quelqu'un qui s'ouvre,
pour quelqu'un qui vit... Voilà, ce sont des choses qui sont
en tout cas extrêmement électrochocs dans ma vie
et, c'est assez difficile après de supporter cette injustice. Est-ce qu'il vous
arrive de temps en temps d'imaginer qu'un jour vous allez disparaitre
complètement des médias, de la scène,
de la chanson ? Ecoutez,
j'ai le sentiment que ce sera mon dernier interview. Celui-là,
en ce moment ? Celui-ci
! Mais, mais... Ca vous choque, si
je vous dis qu'être si sûre de son
désir, faire ce que bon vous semble et mener votre
carrière comme vous la menez, en vous moquant, en gros, des
qu'en-dira-t-on et en faisant ce que vous voulez, c'est aussi
né d'un énorme orgueil ? Je
ne pense pas que ce soit ni de l'orgueil, ni être
sûre de soi. Je pense que c'est plutôt une aversion
pour le compromis. Je me suis toujours dit que je ne serais jamais
dirigée par mes propres peurs. Parce que les peurs peuvent
engendrer des choses terribles. Mais, je n'ai jamais
cédé à mes peurs.
Donc, vous avez
dépassé vos peurs ? J'ai
dépassé mes peurs. Parfois, elles reviennent
avec force, avec fracas. Mais, je ne ferai jamais rien qui est
guidé par la peur. Jamais. Au final de cet
entretien, on se rend compte qu'on vous a beaucoup
fantasmée, qu'on a imaginé que tout ça
était calcul, ces apparitions, ces disparitions et que,
c'est votre rythme à vous, finalement ? Tout
à fait ! Vous aimez le
silence ? Je
crois que le silence m'aime, plutôt. (Rire.). On va
peut-être se quitter sur un silence, alors... Sur
un silence... Merci à vous. (Silence.)